Argumento
Go west, young men !" En ce temps-là, au début des années soixante, deux jeunes frenchies gardent dans un coin de leur tête cette vieille formule magique, véritable exhortation à partir conquérir la mythique Amérique. L'un s'appelle Pierre Christin, a enseigné l'anglais et nourri sa jeunesse à la culture américaine – jazz, cinéma et littérature. L'autre, copain du premier, s'appelle Jean-Claude Mézières. Après un premier départ avorté vers l'Amérique en compagnie d'un certain Jean Giraud (futur dessinateur de Blueberry), adolescent comme lui, il rêve toujours de franchir l'Atlantique. Avec un grand "A", comme "aventure"… Quelques années plus tard, ils se feront connaître grâce aux aventures de Valérian, agent spatio-temporel de son état, et grand arpenteur d'espaces lui aussi. Mais pour l'heure, les deux lascars décident enfin d'aller voir aux États-Unis si l'herbe est plus verte. Cap à l'Ouest, donc. Nous sommes en 1965, et le duo Christin-Mézières découvre le nirvana, ou presque. Les voilà enfin dans l'Ouest américain, sillonnant en voiture ou à cheval les terres d'élection de leur imaginaire de jeunesse. Montana, Wyoming, Colorado, Utah, Idaho, Arizona… Quelques années plus loin, ils ont décidé de refaire un tour là-bas pour voir si les choses ont changé. Résultat : un volume de la collection des Correspondances de Christin où se côtoient photos d'époque particulièrement savoureuses et dessins récents de Mézières (les images du jeune Christin, alors enseignant à l'université de Salt Lake City, en train de commenter les élections françaises sur une chaîne de télé locale valent le détour !).
Un livre, en forme de bilan, pour dire à quel point l'Amérique encore sauvage de leur jeunesse a perdu une bonne part de son âme. Aujourd'hui, les cow-boys se déplacent en 4x4, les casinos dénaturent le paysage et les Blancs aisés s'enferment dans des résidences protégées. Bref, l'Amérique tend fâcheusement à oublier ses valeurs premières pour se laisser gagner par un individualisme excessif. Heureusement, il reste la nostalgie : celle d'une époque où ce pays savait défendre les idéaux de liberté et d'altruisme de ses pères fondateurs. Ce qui nous vaut quelques photos étonnantes montrant les futurs créateurs de Valérian s'essayant à l'art délicat de la vie de cow-boy, stetson vissé sur la tête et bottes aux pieds. Valérian devrait peut-être donner un petit coup de pouce temporel au destin, histoire de repeindre les États-Unis d'aujourd'hui avec les couleurs d'un passé à jamais enfoui… --Gilbert Jacques